Pharmacovigilance

L’ANNEE 2020 DU MEDICAMENT, EN BREF

Tous les mois, Prescrire publie une analyse indépendante et méthodique des nouveautés concernant les médicaments : nouvelles substances, nouvelles indications, nouvelles formes pharmaceutiques, etc...

L’objectif est d’aider les abonnés à distinguer, parmi les nouveautés, celles qui apportent un progrès pour les soins de celles sans intérêt car sans progrès, voire celles qui n’auraient pas dû être autorisées vu les incertitudes ou leur dangerosité.

 

En 2020, 9 progrès notables sur 109 nouveautés. 

En 2020, 109 nouveautés médicamenteuses ont été cotées par Prescrire (voir le tableau

page 143). Un progrès a été apporté par 27 nouveautés. Ce progrès a été majeur pour une d’entre elles (cotée

“Bravo”) et notable pour 8 autres (cotées “Intéressant” ou “Apporte quelque chose”). Pour 18 nouveautés, le progrès a été minime (cotées “Éventuellement utile”).

Cette année, la moitié des nouveautés n’ont pas apporté de progrès (55 cotées “N’apporte rien de nouveau” sur 109). Pour 17 nouveautés, la balance bénéfices-risques est incertaine (cotées “Ne peut se prononcer”), soit 16 % des dossiers. Cette proportion est plus élevée que lors des années précédentes (généralement entre 4 % et 10 %). Enfin, 10 nouveautés ont été évaluées plus dangereuses qu’utiles (cotées “Pas d’accord”).

 

Progrès majeur apporté par un vaccin. 

 Cette année, un vaccin constitue un progrès majeur : le vaccin Ebola rVSV-Zebov°, qui aide à prévenir dans l’entourage d’un patient contaminé la transmission de la fièvre hémorragique à virus Ebola, une maladie infectieuse très souvent mortelle. Parmi les huit autres nouveautés représentant un progrès notable, cinq sont des médicaments dits orphelins destinés à des patients atteints de maladies rares. Et deux médicaments concernent exclusivement les enfants : le glibenclamide dans le diabète néonatal en suspension buvable prête à l’emploi ; et le cannabidiol dans certaines formes graves d’épilepsie chez des enfants à partir de l’âge de 2 ans.

 

Des “nouveautés” pas si nouvelles, plus dangereuses qu’utiles.

En 2020, la plupart des nouveautés évaluées plus dangereuses qu’utiles concernent des substances déjà sur le marché, autorisées dans d’autres situations cliniques ou sous une autre forme, par exemple : la dapagliflozine dans le diabète de type 1 ; le dénosumab dans l’ostéoporose cortisonique ; la drospirénone sous forme non associée dans la contraception ; le diclofénac en comprimés non gastrorésistants. Certaines de ces substances étaient déjà à écarter selon Prescrire dans d’autres situations cliniques ou sous des formes préalablement autorisées.

 

Des réévaluations motivées par la pharmacovigilance, mais des retraits du marché non aboutis dans l’Union européenne.

En 2020, les commissions de pharmacovigilance (PRAC) et d’AMM (CHMP) de l’Agence européenne du médicament

(EMA) ont réévalué la balance bénéfices-risques de plusieurs médicaments en raison de signaux de pharmacovigilance. L’ingénol mébutate, utilisé dans les kératoses actiniques, a ainsi été retiré du marché en raison d’un surcroît de cancers cutanés. Et l’AMM de l’ulipristal dosé à 5 mg, utilisé dans les fibromyomes utérins, a dans un premier temps été suspendue en raison du risque d’hépatite grave. Il pourrait toutefois être remis sur le marché, à la suite de l’avis du CHMP daté de novembre 2020. Par ailleurs, l’alemtuzumab, utilisé dans la sclérose en plaques, reste sur le marché, malgré les risques disproportionnés auxquels il expose.

 

Nouvelles AMM bienvenues pour deux anciens médicaments indisponibles.

En France en 2020, deux substances utiles ont été remises à disposition en ville grâce à une nouvelle AMM : la phénytoïne, un antiépileptique, sous le nom commercial Diphante°, qui remplace une spécialité importée régulièrement pour faire face aux multiples ruptures de stock du princeps Dihydan° ; le probénécide, un uricosurique, remis à disposition en ville sous le nom commercial Santuril° après l’arrêt de commercialisation de la spécialité pharmaceutique Bénémide°. Ces remises à disposition de médicaments parfois utiles sont bienvenues. Les pénuries de médicaments sont souvent à l’origine de défauts de soins et d’événements indésirables, parfois gravement préjudiciables aux patients (lire n° 440, p. 422-424).

 

En somme.

 En 2020, moins de 10 % des nouveautés apportent un progrès notable pour mieux soigner. Pour 16 % des nouveautés, leur balance bénéfices-risques est incertaine, ce qui traduit notamment la tendance des agences du médicament à autoriser trop précocement des médicaments, sur la base de données insuffisantes. Mais ce bilan montre aussi que certains progrès décisifs peuvent être l’aboutissement d’un travail collectif, comme c’est le cas avec le vaccin contre la fièvre hémorragique à virus Ebola et le fexinidazole dans la maladie du sommeil.

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